Comment Einstein, De Vinci et d’autres grands maîtres ont-ils pu briller à ce point ? Comment ont-ils pu transformer et marquer le monde à travers l’immense maîtrise de leur domaine de prédilection ? Comment pouvons-nous maîtriser notre domaine d’expertise ? Comment appréhender le développement de compétences ?
Atteindre l’excellence est un excellent livre si l’on recherche une littérature de l’apprentissage. Ne vous attendez pas à trouver des conseils concrets ou des recherches poussées à ce sujet.
Comme pour ses autres livres, Robert Greene ne va pas dans la profondeur des sujets mais nous livre plutôt une philosophie, une idée de la quête de la connaissance et de la maîtrise.
Cet auteur est réputé pour sa culture générale, sa connaissance historique et sa capacité à croiser différentes informations historiques et biographiques de grands noms afin de trouver des indices, une voie qui se dessine.
Atteindre l’Excellence est dans la continuité des autres ouvrages de Greene. L’auteur nous propose une idée de la maîtrise, un cheminement philosophique et mental à effectuer pour un jour atteindre la maîtrise.
En quoi ce livre peut vous intéresser ?
Bien qu’il ne réponde pas concrètement à l’acquisition de compétences, je pense que chacun devrait lire cet ouvrage. Si l’on peut qualifier le stoïcisme ou le bouddhisme de philosophies de vie, atteindre l’excellence nous propose une philosophie de l’apprentissage.
Comment appréhender les échecs ? Les génies le sont-ils réellement ? Sont-ils davantage des pratiquants avisés et obstinés ? Pouvons-nous aussi atteindre l’excellence ? Y a-t-il certaines expertises à développer ? Comment pouvons-nous trouver notre vocation ?
Voici le genre de question auxquelles répond Greene.
Je le conseille à quiconque tentant de développer lors de leurs études ou dans le monde professionnel des compétences complexes. Ce n’est pas une ligne droite, même pour les plus grands.
Qu’est-ce que la maîtrise ?
La maîtrise peut se résumer en une intégration extraordinaire d’une multitude de schémas répétitifs
La maîtrise d’un domaine ou d’une compétence ne repose pas dans le génie d’une personne. Certains peuvent avoir des facilités à développer des compétences, ils peuvent avoir plus de facilité que d’autres dans certains domaines mais la maîtrise n’est jamais inée, en tout cas, elle ne l’est jamais dans chacune des histoires narrées par Greene.
La maîtrise, comme la sélection naturelle dans la théorie Darwinienne, identifie les futurs maîtres : seuls les plus persévérants pourront un jour espérer devenir maître. La maîtrise est la récompense de l’obstiné et de l’obsessionnel, de celui ou celle qui saura vaincre ses peurs, ses envies d’abandonner quand tout ira mal et surtout celui qui sera prêt à embrasser son apprentissage, ses avantages et surtout ses désavantages et obstacles.
La maîtrise repose sur les milliers d’heures d’exercices et d’intense concentration pour permettre à l’heureux pratiquant de trouver des liaisons là où personne n’en voit : la maîtrise permet d’associer l’intuition et la pensée rationnelle.
Quel chemin devons-nous choisir ?
L’auteur nous propose un chemin en plusieurs étapes à suivre avec attention. C’est en analysant la vie de nombreux grands maîtres de tous les domaines que Greene en est venu à cette conclusion.
D’abord Greene nous propose de trouver notre voie, comment pouvons-nous identifier le domaine qui ne fera qu’un avec nous ? Ensuite, une fois notre vocation identifiée l’auteur nous invite à comprendre le vrai cheminement de l’excellence, un chemin long qui invite à la patience et à la maîtrise de soi, à la soumission au processus. Enfin, l’auteur nous propose la phase créative active, la phase ou l’on pourra commencer à gagner notre vie, à expérimenter et exprimer notre créativité. Lors de ce chemin, Greene nous propose également de développer nos compétences relationnelles, primordiales à notre évolution dans une société pleine de personnes potentiellement malveillantes. Après tout cela seulement, nous pourrons espérer atteindre la maîtrise de notre domaine d’exercice.
Comment trouver sa vocation ?
Robert Greene nous décrit la vocation comme un appel profondément ancré en nous. Trouver sa vocation serait presque un rituel mystique : nous reprenons contact avec notre être profond.
Cet appel interne peut prendre plusieurs formes : l’attirance particulière pour des objets, des sujets, une fascination pour des choses de la vie, un parcours particulier.
Pour cela il faut comprendre que notre route est sinueuse, qu’à n’importe quel âge et n’importe quelle étape de notre vie nous pouvons trouver notre domaine. Nous sommes souvent happés par la vie, par les conseils de nos parents et de nos proches, par l’angoisse de l’échec et l’incertitude : tout ceci nous fait bifurquer.
Un jour cependant, on découvre un domaine voisin au nôtre, faisons taire notre égo ou reprenons contact avec nos goûts de l’enfance : nous reprenons contact avec l’œuvre de notre vie.
Quels moyens avons-nous à notre disposition ?
L’auteur nous propose différents actions à entreprendre pour trouver ou trouver notre voie :
- Quelles étaient nos profondes attirances dans l’enfance ? Quand nous étions libres de tout fardeau ou de pressions sociales, quels étaient les domaines qui nous attiraient ?
- Vous êtes déjà bien avancé dans votre métier, avez fini vos études mais vous sentez que vous n’êtes pas tout à fait à votre place. Pouvez-vous chercher dans des domaines adjacents ? Pouvez-vous vous ultra-spécialiser dans un sous-domaine ? N’aimez-vous finalement pas qu’une partie de ce domaine ?
- Ne vous êtes-vous pas trompés de carrière ? N’êtes-vous pas tombés dans l’impasse de l’égo et avez suivi, gloire, argent et reconnaissance au lieu du plaisir profond de la pratique ?
- Utilisez votre expérience passée et votre connaissance de vous-même pour réfléchir mais surtout, prenez conscience que la maîtrise prend du temps et que c’est un parcours frustrant : n’êtes-vous pas déjà dans votre domaine ?
Comprendre la patience nécessaire à la maîtrise
La créativité n’est pas innée. Bien que certains aient des facilités, tous les maîtres se sont reconnus par une pratique intense et presque obsessionnelle de leur domaine d’expertise. Maîtriser son domaine impose une certaine discipline : il faut se soumettre à l’apprentissage.
On peut identifier des techniques d’apprentissage, augmenter la qualité de notre concentration, trouver certains hacks. Par contre, vous ne pouvez pas brûler les étapes : l’apprentissage demande du temps, de l’énergie, des échecs et de la frustration.
Les étapes de l’apprentissage initial
D’abord Robert Greene nous propose l’observation du domaine. Nous devons commencer par avoir une attitude distante avec la discipline et comprendre les rouages sociaux, culturels et techniques du domaine.
Ensuite, l’auteur nous invite à entamer la phase d’apprentissage : nous ne devons viser ni créativité ni résultats, seule l’acquisition de connaissance compte. Cette partie va reposer sur la répétition. Bien qu’ennuyante et fastidieuse elle est pourtant essentielle.
Robert Greene nous rappelle ici l’importance de la vocation. L’ennui et la frustration peuvent vite nous décourager et nous amener à chercher des raccourcis, à procrastiner voire abandonner. C’est là qu’il ne faut rien lâcher.
Enfin, nous passons à la phase d’expérimentation. Ici nous pouvons commencer à appliquer nos connaissances, expérimenter et tester notre créativité : on entre dans le mode actif de l’apprentissage.
Quelles sont les clés pour réussir au mieux cette étape ?
- Cultiver son esprit d’étudiant, accepter que l’erreur est clé dans l’apprentissage
- Faire confiance au processus et au fonctionnement de notre esprit. Nous serons bloqués tôt ou tard. Il faut faire confiance aux méthodes d’apprentissage que nous utilisons et à la capacité de notre esprit à comprendre et retenir les informations sur lesquels nous bloquons. C’est d’ailleurs un des paradoxes de l’apprentissage
- Être capable de surmonter la douleur de l’échec et cultiver une certaine stabilité émotionnelle pour poursuivre
- Apprendre des échecs et instaurer un feedback systématique
Quitter l’apprentissage pour arriver dans la pratique créatrice : la phase créative-active
Cette étape est essentielle. Pour certains domaines elle correspond à la fin des études supérieures, pour d’autres elle peut intervenir après nos premières années d’exercice de notre profession.
Il est essentiel de comprendre une chose : notre œuvre ne sera pas visible immédiatement. Ce n’est qu’à l’aube de notre vie que nous identifierons un parcours logique. Jusqu’alors il faut accepter de faire des allers-retours, de commettre des erreurs et de se tromper parfois de voie.
Il faut comprendre que l’œuvre de notre vie se construit au fur et à mesure et surtout sur la base de nos erreurs. L’auteur nous invite à rendre conscient cet aspect du surpassement. On sait que cela va être difficile, que l’on va échouer pour pouvoir mieux réussir.
Quelles sont les clés pour le début de la pratique créative et active ?
L’auteur nous propose plusieurs solutions et voies à explorer pour réussir au mieux à nous rapprocher de l’œuvre de notre vie. D’abord, Greene nous invite à chercher l’abondance. Il ne faut pas se fixer d’objectifs vagues mais préciser ce que l’on cherche à obtenir et accumuler les expériences, les informations et tout input qui va dans ce sens.
Ensuite, l’auteur nous invite à cultiver notre curiosité, à explorer tous les recoins de notre domaine d’expertise ainsi que de découvrir les domaines voisins ou opposés. C’est par l’union des idées que les grandes découvertes se sont faites.
Enfin, l’auteur nous invite à éviter des prises de position conservatrices. C’est le mouvement perpétuel qui récompense les audacieux. Il conviendra d’éviter l’autosatisfaction et de cultiver notre regard critique sur notre propre œuvre. La clé sera de cultiver l’approche de l’étudiant perpétuel, l’approche itérative d’essai-erreur.
Seulement alors nous pourrons entrevoir la maîtrise.
L’intelligence relationnelle
En tant qu’animaux sociaux, nous évoluons entouré de personnes, plus ou moins expertes, plus ou moins intéressantes, intelligentes et bienveillantes. Il ne tient qu’à nous de l’accepter et de prendre du recul sur les jeux sociaux.
Robert Greene nous rappelle l’importance de l’empathie, il pense même qu’il est impossible d’atteindre la maîtrise si nous ne réussissons pas socialement avec les personnes qui nous entourent. Nous devons voir le monde à travers les yeux des autres, tenter de comprendre ce qu’ils désirent pour leur apporter.
Pour cela nous devons commencer par nous analyser nous-mêmes, nous détacher émotionnellement des piques que l’on peut nous faire ou des insultes à notre encontre. Résister à la tentation de se sentir concerner par les choses de la vie et résister à l’interprétation des intentions des autres.
Robert Greene nous invite à nous taire et à faire parler notre travail, d’éviter toute vantardise. Il conviendra de se donner l’image adéquate selon notre groupe social et surtout de se voir soi-même dans le regard des autres afin de modifier certains de nos comportements pouvant nous causer plus de torts que de bien.
Pour Atteindre l’excellence il n’y a pas de méthode miraculeuse
Comme j’ai pu vous le dire en introduction, il ne faut pas attendre de cet ouvrage une aide miraculeuse, une méthode incroyable vous permettant de développer vos compétences. Non, Atteindre l’Excellence est un livre qui traite d’une espèce de philosophie de l’apprentissage. Ce ne sont pas des règles gravées dans le marbre mais plus une considération abstraite des conditions nécessaires à l’obtention de la maîtrise.
Personnellement, je pense que la clé de ce livre réside dans les parties traitant de notre intelligence émotionnelle. La maîtrise de notre domaine demande un investissement presque obsessionnel, d’accepter la bêtise humaine, de tolérer nos échecs et même de les surpasser. La clé de cet ouvrage est donc la compréhension du processus global de la maîtrise : il prend du temps, il est difficile, il est extrêmement exigeant.
Nous devons nous armer de patience et développer des méthodes pour canaliser notre frustration qui sera quotidienne dans notre vie d’étudiant perpétuel.
La maîtrise exige deux compétences essentielles : la maîtrise de notre domaine et la maîtrise de notre état émotionnel.